samedi 11 février 2012

Sarkozy dans le Tarn

Lavaur. Visite de Nicolas Sarkozy : la présence des enfants fait polémique
politique - La Dépêche du Midi - Publié le 11/02/2012
(Richard Bornia)

L'enthousiasme trop démonstratif de responsables, normalement astreints à la neutralité, a du mal à passer chez certains observateurs de la visite du président candidat.


140 enfants sur le parvis de l'hôtel de ville de Lavaur. Ils crient: «Sarkozy, Sarkozy!». Mardi 7 février, 12h20, le président de la République descend les marches de l'hôtel de ville sous les acclamations des élèves de l'école du Centre de Lavaur. Dans leurs mains, ils agitent des petits drapeaux tricolores.

Le chef de l'Etat s'approche: il est happé par une animatrice de l'ALAE (Accueil loisirs associé aux écoles) qui l'embrasse. Il réussira tout de même à avoir quelques mots gentils pour les petites têtes blondes. Une sortie de l'ALAE qui n'a pas été du goût de tous les parents.

Laure (prénom modifié) s'étonne: «Cela avait l'air très difficile d'approcher le président en raison des barrières de sécurité. En fait, il suffit de promener quelques gamins et hop, on a droit à la bise!».

SORTIE IMPROMPTUE
Cyrille Atlan , parent d'élève explique:« L'ALAE a proposé aux enfants de sortir de l'école et d'aller voir le représentant de notre pays. On leur a donné un drapeau bleu blanc rouge et on leur a demandé de dire fort «Vive Sarkozy!». Je n'ai pas été prévenue de cette sortie impromptue.». De son côté, Coralie Lestrade a amené hier matin un courrier à l'attention de Bernard Carayon et de ses employés: « Pourquoi n'ont- ils pas uniquement pris les enfants ayant une autorisation? Des recommandations très précises ont été données aux enfants : «bien se tenir, se mettre en rang, crier Sarkozy, Sarkozy, leur donner des petits drapeaux français pour qu'ils puissent les secouer » . En revanche, d'autres parents, n'ont pas caché leur satisfaction à ce que leur enfant voit le président. Une note d'information a bien été remise aux parents des enfants de l'ALAE, mais tous les parents ne l'ont pas eue dans le cartable. D'après notre décompte , effectué hier, ils étaient au moins 12 dans ce cas. Dans cette note, il est stipulé «que les enfants de l'ALAE du centre assisteront au passage du cortège présidentiel sur les allées Jean-Jaurès. Dans l'hypothèse où vous ne souhaiteriez pas que votre enfant participe à cette animation, veuillez le signaler à la direction de cette structure».Or les petits n'ont pas été conduits sur les allées Jean-Jaurès comme indiqué dans la note, mais bien à l'intérieur du périmètre de sécurité, place du genéral Sudre.

PRO ET ANTI SARKO À LA RÉCRÉ
A la mairie, on explique que cette «animation» a été faite au dernier moment et dans la précipitation, ce qui expliquerait que la demande soit inexacte et que certains parents ne l'aient pas eue dans les cartables. Cela suffira-t-il à calmer la colère de certains parents d'élèves particulièrement remontés? «Personnellement nous n'avons pas souhaité que notre fils participe à cette sortie, ce que je constate c'est que cela crée à l'intérieur de l'école deux clans: les pro et les anti Sarkozy, ce qui est particulièrement déplorable», précise Stéphanie Taulelle, une maman.

Hier soir, la ville donnait l'assurance qu'il n'y avait eu aucune manipulation ni des employés, ni des enfants, lors de cette sortie. A 17 h, hier, plusieurs parents distribuaient un tract pour dénoncer ce qu'ils appellent une «manipulation».

Joseph Dalla-Riva : "Les contraintes de sécurité expliquent les imperfections"
Interrogé en tant qu'adjoint au maire chargé des sports et de la jeunesse, Joseph Dalla Riva a déclaré hier : «Je rappelle tout d'abord que Lavaur a eu l'honneur d'accueillir, c'est historique, une visite officielle du Président de la République qui est de par la constitution, président de tous les Français, représentant la nation toute entière. Dans ce cadre, j'ai souhaité, à la fois en ma qualité d'ancien enseignant du public, et compte tenu de mes convictions républicaines profondes, que les enfants inscrits à l'ALAE se situant sur le parcours, puissent profiter pleinement de cette journée exceptionnelle. Le seul objectif était que ces enfants puissent voir le président, le plus près possible afin qu'ils gardent de cet évènement un souvenir fort qu'ils pourront raconter encore en étant adultes. Compte tenu des contraintes de sécurité particulières, nous avons eu cette possibilité au dernier moment, ce qui explique certaines imperfections. Si je comprends les interrogations exprimées, je ne peux en revanche accepter la volonté délibérée de nuire, dont certains font preuve. Les sourires et les visages radieux lèvent toute ambiguïté et peuvent rassurer les parents. Les enfants n'ont pas agi sous la contrainte. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire que des enfants de l'école publique saluent comme il se doit le premier personnage de l'Etat. Il n'est pas non plus anormal qu'ils brandissent le drapeau français, symbole de l'unité nationale, celui pour lequel se sont battus et sont morts ceux de toute origine, de toute obédience politique, de toute religion dont les noms figurent sur le monument à côté de l'école. En tant qu'enseignant laïque, si demain un autre président nous faisait l'honneur de venir à Lavaur, quelle que soit son étiquette politique, j'aurai la même attitude.»

Banderole des enseignants confisquée
6 des 9 inseignants de l'école du Centre ont tenté de manifester pendant que les élèves se rendaient avec les animateurs de l'ALAE sur le parvis de la mairie, place du Général Sudre. Il ne s'agissait que d'une tentative, puisque en moins d'une minute ils se sont vus confisquer leur banderole et prier de reculer jusqu'à l'hôpital soit à plus de cent mètres des barrières de sécurité. «Nous avons déployé la banderole où était inscrit «Ecole sacrifiée, avenir en danger». Deux gendarmes se sont approchés de nous. Nous avons dialogué gentiment, puis nous avons été entourés par 4 personnes en civil, très certainement des policiers, qui ont pris notre banderole et se sont enfuis en courant» raconte, une des institutrices. «Nous sommes étonnés de ne pas pouvoir faire connaître notre ressenti lors de la venue du Chef de l'Etat et de lui faire croire que tout est beau dans le meilleur des mondes», ajoute une de ses collègues.

Pierre Bangi : "Drôle de cours d'éducation civique"
Pierre Bangi, leader de l'opposition de gauche au conseil municipal et secrétaire de la section PS de Lavaur a réagi mercredi 8 février sur son blog au sujet de la présence des enfants : « On » nous dit qu'il aime les gens, on a du mal à le croire. C'est étrange, on a l'impression que l'on a parachuté Paris et l'Elysée à Lavaur. Il fallait un décor avec des figurants, il les a trouvés… Certains ont d'ailleurs fait du zèle. Peut-être s'en mordront-ils les doigts ? L'un d'eux est allé chercher les enfants de l'école du Centre, durant leurs heures de CLAE, munis de drapeaux tricolores et sans la permission de leurs parents : ils ont acclamé « Nicolas»… drôle de cours d'Education Civique…»